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Template:Wikipédia:Lumière sur/Date de publicationright|120px|Harry Mathews en 2004.
Le Dialecte de la tribu est une nouvelle humoristique de neuf pages de Harry Mathews (1930 - 2017), un écrivain américain francophone, proche de Georges Perec et entré à l'Oulipo en 1973. Elle porte sur le pagolak, dialecte d'une tribu montagnarde du centre de la Nouvelle-Guinée censément étudié dans les années 1920 par le linguiste australien Ernest Botherby (Perth, 1869 - Adélaïde, 1944). Cette langue aurait la caractéristique d'être intelligible des tribus voisines sans qu'elles comprennent le sens des termes employés. De fait, les dictionnaires se révèlent inappropriés à la compréhension de ce phénomène, de même que les tentatives d'explication, de telle sorte que le narrateur se trouve réduit, à l'instar du Dr Botherby, à effectuer lui-même ce processus, en pagolak. L'envahissement progressif d'un discours prétendument scientifique par un autre, incompréhensible, en pagolak, produit un effet comique tout en questionnant le processus de la traduction, tant au plan du caractère performatif du résultat que de l'intraduisibilité de l'original.
La publication originale en anglais, en 1980, a été précédée par celle de la traduction française d'un premier état plus long de la nouvelle, comportant plusieurs détails qui renvoient explicitement à la relation de l'auteur avec Perec, ensuite supprimés dans la version définitive. Mathews reprend par ailleurs seize ans plus tard, dans Oulipo et traduction : Le cas du Maltais persévérant, le personnage du Dr Botherby pour le compte-rendu d'une autre découverte ethnolinguistique de ce dernier, celle des Ohos, dont la langue se réduit aux trois mots « Rouge égale mal » et des Ouhas, qui ne peuvent dire eux aussi qu'une seule phrase, « Ici pas là ». La tentative de rendre compte aux Ohos de la langue des Ouhas conduit Botherby à se rendre compte qu'une langue ne dit que ce qu'elle peut dire. Cette variante fait référence à un chapitre de La Vie mode d'emploi de Perec, l'histoire de l'anthropologue autrichien Appenzzell et plus particulièrement ses considérations sur la pauvreté de vocabulaire alléguée des Kubus de Sumatra.
Les deux versions du Dialecte de la tribu et Oulipo et traduction : Le cas du Maltais persévérant forment un réseau intertextuel de fictions unies par le thème commun de la question de la traduction et par le personnage de Botherby, renvoyant au texte sous-jacent de Perec sur Appenzzell, à la relation entre Mathews et Perec et à leur pratique commune de l'écriture et de la traduction.
Cette nouvelle, qui a attiré l'attention de plusieurs spécialistes de la traduction, a été mise en rapport avec diverses analyses de la philosophie analytique sur les enjeux de la traduction. Elle résonne également avec les travaux précurseurs de l'anthropologue Bronislaw Malinowski, issus de son travail sur le terrain en Nouvelle-Guinée. Elle illustre enfin la conception élargie de la traduction au sein de l'Oulipo, qui en fait un cas particulier d'écriture sous contrainte.